Je parle pas mal de Scarlett en ce moment sur le blog, mais en fait c'est Nishal qui occupe ses esprits.
Une fois de plus, Nishal a mal pris une remarque sur la couleur de peau. La remarque ne lui était pas adressée personnellement, n'était pas blessante, mais il se l'est pris quand même en plein coeur.
Sa peau marron (pourtant si claire, un chouilla plus foncée que la mienne) reste son obsession . Il en parle souvent, se compare aux autres, fait des remarques sur lui, sa soeur, nous ses parents, les gens qu'on rencontre, les personnages qu'il voit à sa télé. Il aime Azur et Asmar car on y voit des couleurs de peau différentes.
Le complexe de sa peau trop foncée selon lui, c'est son point faible, son trauma à lui, là où ça fait mal quand on appuie. J'ai cherché longtemps à le convaincre que sa peau est belle, lui qui se détestait tant il y a qqs années. Maintenant il se supporte un peu plus, de temps en temps il me dit qu'il trouve sa peau belle, mais ce qu'il ne supporte pas, c'est sa différence par rapport aux autres, les copains de classe ou nous, ses parents. Il aimerait tant que son copain basané puisse réintégrer sa classe, et il aimerait encore plus être blanc comme les autres. Dans le moule, transparent, incognito, voilà le rêve de mon ptit gars à la nature si sage et réservée. Il n'aime pas sa différence, ne l'assume pas, et essaye de la faire oublier le plus possible. Il nous le dit souvent : "j'aimerais ne pas être différent". Cela fait mal aux coeurs de nous les parents, mais c'est son profond désir, sa totale conviction.
J'ai fini par accepter qu'il ne changera pas d'avis tout de suite, il sait que je ne pense pas comme lui, mais lui veut absolument maintenir son point de vue. Après tout c'est son droit, c'est sa première position individuelle, sa première conviction de "grand", il faut bien que je la respecte. D'ailleurs, changera-t-il un jour d'avis ? Je l'espère malgré tout, peut-être sous le regard d'une fille amoureuse (ou d'une horde de filles amoureuses !!!!) ?
Mais en attendant, je l'accepte, car je sais que cette profonde conviction est ancrée au fond de lui, et que seuls les évènements de la vie pourront le faire changer, et non les paroles de parents ou de l'entourage bienveillant. Il vit avec, et avance avec sérénité avec ce qu'il considère comme une injustice... Alors pourquoi tenter de le faire changer d'avis, du moment qu'il s'aime toujours ?
Et qui suis-je pour le faire changer d'avis ?
Sa maman, soit.
Mais je n'ai jamais été abandonnée, je n'ai jamais souffert de la dépression et de l'anorexie du nourrisson, je n'ai jamais été adoptée, enlevée de mon milieu familier sans comprendre ce qu'il m'arrivait. Je peux peut-être imaginer comprendre, mais je n'ai pas son ressenti au plus profond de mes tripes.... "Il faut l'avoir vécu pour le comprendre", une fois de plus cette phrase bateau prend tout son sens.
Tout ce que je peux faire, tout ce que nous pouvons faire en tant que parents, c'est le soutenir comme le feraient des béquilles. Mais c'est lui qui marche et qui choisit la route à prendre ; qu'elle lui soit douloureuse ou pas, nous devons l'accepter.
Comme dit Gandhi dans le proverbe que j'ai choisi pour illustrer mon blog, Nishal est en train de commencer à tracer son vrai chemin dans la vie. Il n'a pas pris l'autoroute qui contourne la montage, mais il a choisi de monter directement au col. Et il avance. Moi je l'accompagne en silence en essayant de le soulager, en tentant de lui faire éviter les trous et bosses, comme une béquille donnant la main à son propriétaire...
9 commentaires:
les soutenir, être là à leur écoute, leur faire aussi confiance..c'est notre rôle de parents.tu as raison on pourra jamais se mettre à leur place, mais d'avoir toujours une oreille attentive à ce qu'ils ressentent pour que eux aussi puissent nous faire confiance. Je crois aussi que dans ta campagne ( j'ai pas dit petit patelin pourri..) les enfants chocolat( ou carambar!!!) cela se remarque pas mal. Ton fils est aussi à l'âge où cela n'avait pas été de tout repos pour mes fifilles pour les soucis liés par forcément à la couleur mais à leur identité !!!
J'ai les larmes aux yeux...
Parlez-nous des enfants
Et une femme qui portait un enfant dans les bras dit,
Parlez-nous des Enfants.
Et il dit :
Vos enfants ne sont pas vos enfants.
Ils sont les fils et les filles de l’appel de la Vie à elle-même.
Ils viennent à travers vous mais non de vous.
Et bien qu’ils soient avec vous, ils ne vous appartiennent pas.
Vous pouvez leur donner votre amour mais non point vos pensées,
Car ils ont leurs propres pensées.
Vous pouvez accueillir leurs corps mais pas leurs âmes,
Car leurs âmes habitent la maison de demain, que vous ne pouvez visiter, pas même dans vos rêves.
Vous pouvez vous efforcer d’être comme eux, mais ne tentez pas de les faire comme vous.
Car la vie ne va pas en arrière, ni ne s’attarde avec hier.
Vous êtes les arcs par qui vos enfants, comme des flèches vivantes, sont projetés.
L’Archer voit le but sur le chemin de l’infini, et Il vous tend de Sa puissance pour que Ses flèches puissent voler vite et loin.
Que votre tension par la main de l’Archer soit pour la joie ;
Car de même qu’Il aime la flèche qui vole, Il aime l’arc qui est stable.
Khalil Gibran, Le prophète
C'est ce texte que j'ai choisi pour commencer mon livre... par rapport à la symbolique et bien davantage! Il répond très bien à ta réfléxion!
Oui cela fait maintenant 3 jours que Bhavishya vient me voir pour me dire qu'elle a la peau noir je lui ai dit que non elle n'a pas la peau noir mais chocolat et que c'est délicieux le chocolat.
Mimi a raison ont doit être là pour soutenir nos enfants,être à leur écoute.
Mais comme pour tout on ne peut pas se mettre à leurs place ou à la place des autres en général si l'on est pas passé par là. (Après tout, on reproche les gens de ne pas comprendre nos soucis de filles DES, non?) On peut essayer d'imaginer la douleur mais surtout doit d'être présent et leur montré que l'on "care" et qu'on les aimes tels qu'ils sont et je crois le plus important c'est qu'ils nous fassent confiance et vice versa et pour cela l'on doit être cohérent.
Nishal est dans mes prières.
Biz,
Sas
Merci Sas pour tes prières, c'est gentil !
Sabine, ce texte me suit depuis le début de notre parcours adoption. Plusieurs personne me l'ont envoyé, donné en Inde, je l'ai vu affiché dans les orphelinats...
Si un jour on a un troisième, je finirai ptête par le mettre dans le faire-part, joli façon de clôturer une si belle aventure...
Pour la petite histoire, Moushette... ce texte, avant dêtre la préface de mon livre... était le texte lu, lors de note mariage! Et à l'époque, même avec le distilbène... on voulait des enfants... mais nous n'avions aucun projet d'adoption en vue!
Alors ce texte, je l'aime doublement, triplement. il nous suit depuis le début, ce n'est pas un hasard!
Très triste, la réaction de Nishal... La plupart des enfants (voire tous) veulent être comme les autres et ont l'impression que seule la ressemblance leur permettra d'être accepté par le groupe. Dommage. La diversité est si enrichissante...
Mais il doit y avoir une solution et vous finirez par la trouver. D'ailleurs il FAUT la trouver. Est-il possible de lui construire une estime de soi telle que la prise de conscience de ses qualités, de ses points forts, etc., lui fasse "oublier" sa difficulté à accepter sa couleur de peau ? S'il a beaucoup d'autres choses à mettre en avant, il sera de moins en moins l'enfant "adopté" ou venu d'ailleurs aux yeux des autres et à ses yeux. Il ne s'agit pas de gommer sa "différence", mais de l'aider à ne pas voir que cela...et peut-être d'insister aussi sur tout ce qu'il partage avec les autres.
Enfin, il ne s'agit que de réflexions à haute voix, mais il faut trouver une solution pour qu'il finisse par s'adorer, car il est vraiment adorable.
Laurence,
Tu sais y a les belles théories, mais après y a la pratique. Nishal se fait une opinion sur son vécu, et nos paroles ont des répercussions à court terme. Il dit "oui" pour nous fair plaisir, mais n'en pense pas moins !
Il faut aussi ne pas trop en parler pour que ça ne devienne pas un sujet obcessionnel pour lui, c'est un juste équilibre.
Lui n'associe pas sa différence de peau à son adoption, car il n'a pas tout à fait compris toutes les subtilités de la génétique en la matière ! Il ne sait pas qu'un enfant sorti de mon ventre serait plus clair. La peau est indépendante de l'adoption pour l'instant.
Il s'aime pour bien d'autres choses, mais ce truc là (la couleur), c'est pour l'instant non négociable...
Mais comme je lui dis souvent, chaque enfant a sa faille, sa différence, son épreuve dans la vie à gérer. La sienne est visible, voilà tout. Et ça il le sait, donc finalement il assume le fait que ce soit sa différence, même si elle ne lui plait pas !
Je ne voulais pas parler de belles théories car chaque enfant est unique et car, comme le dit le titre d'un livre, "J'étais une excellente mère...jusqu'à ce que j'aie des enfants !".
Mais l'éternelle optimiste que je suis pense qu'il y a toujours des solutions bien cachées quelque part, une façon d'aider nos enfants à surmonter leurs problèmes (quels qu'ils soient), et que vous finirez par trouver la solution qui lui convient.
En tout cas, bon courage...
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